LES FUSILS LANCE-AMARRES

Deux types de fusils sont utilisés pour lancer des flèches Delvigne en bois :

Le Mousqueton de gendarmerie de portée 30 à 40m selon la direction du vent (Flèche Delvigne en bois) approprié pour le lancement d'amarre dans les ports.
Caractéristiques : Cal. 17 mm, Long = 1145 mm, Poids = 3 kg 280

ou

Le Fusil de rempart de portée 80 à 90m selon la direction du vent (Flèche Delvigne en bois) approprié pour les sauvetages en bords de côte.
Caractéristiques : Cal. 25 mm, Long = 1235 mm, Poids = 8 kg 620

Il étaient attribués aux postes de douane du littoral et aux gardiens de phares.



La flêche Delvigne

La flèche Delvigne, peut s'adapter aux armes à feu de toute sorte et de toute dimension. C'est une baguette en bois ou en fer portant à ses deux extrémités, ou seulement même à son extrémité postérieure, une virole saillante. On fait autour de la baguette, au moyen de plusieurs tours de ligne, un coulant glissant à frottement dur d'un bout à l'autre. Sur le coulant on place une bague embrassant et serrant la flèche, et aux deux doubles de cette bague on amarre l'extrémité de la ligne destinée à établir la communication. Après avoir versé dans l'arme à feu de la poudre et placé une bourre par-dessus, on introduit la flèche, la virole la première lorsqu'il n'y en a qu'une; on fait glisser le coulant de manière à ce qu'il se trouve hors du canon, la bague est placée sur le coulant, la ligne forme une pelote ordinaire que l'on pose à terre. On en prend le bout intérieur pour l'amarrer à la bague.
Lorsque le coup part, la bague et le coulant glissent le long de la flèche et s'arrêtent à la virole. La ligne est mise en mouvement progressivement, et le choc qu'elle reçoit, se trouve en partie amorti.
(Extraits des Annales du Sauvetage 1869)



Contenu de la caisse de flèches porte-amarres de sauvetage Delvigne :


1° Six flèches pourvues de leurs attaches et coulants (y).
2° Quatre pelotes de lignes de cent mètres de long (a).
3° Une pelote de vingt mètres de cordeau pour attaches.
4° Une petite pelote portant 12 bouchons pour flotter (b).
5° Une petite pelote de fil goudronné pour les ligatures.
6° Deux mandrins coniques pour peloter les lignes (c).
7° Une boîte pour porter la pelote en sautoir (d).
8° Deux mesures pour la poudre, l'une pour 2 grammes, l'autre 2 ,5 g.
9° Deux petits mandrins en bois pour rouler les cartouches.
10° Deux petites boîtes en fer-blanc pour la poudre et pour la graisse.
11° Un bout de cylindre en cuivre, à engager sur la virole antérieure de la flèche, pour servir de moule à couler le lingot.
12° Une cuiller à fondre le plomb.
13° Vingt-quatre culots en carton embouti (f).


Mode d'emploi de la flèche Delvigne

1° S'assurer si la ligne est bien disposée pour se développer.
2° Examiner si les attaches et le coulant de la flèche serrent convenablement ; les resserrer s'il est utile, les pousser contre la virole antérieure et graisser le bois de la flèche au besoin.
3° Brûler une capsule, ou flamber même, par précaution.
4° Verser dans le mousqueton 2 à 2 1/2 grammes de poudre.
5° Introduire une bourre ou le sabot, en carton, l'évasement du côté de l'a poudre, et puis placer la flèche dans l'arme.
6° Passer la ligne en deux ou trois passes dans les quatre boucles de l'attache, et relier son bout par deux demi-noeuds coulants.
7° Placer la pelote de ligne à terre, ou la porter en sautoir dans sa boîte.
8° Pointer le mousqueton sous 15 à 25 degrés au-dessus du point à atteindre, si on est dans la direction du vent ou bien à droite ou à gauche d'une quantité proportionnée à sa force et à sa direction.
9° S'il y a lieu de faire entraîner par la flèche le chapelet de bouchons, on attache le bout de corde qui les porte à l'extrémité de la ligne pelotée ; on place les bouchons, tous en ligne droite devant soi, on ramène en arrière l'autre bout de la corde qui les porte, et on la passe et fixe dans les boucles de
l'attache.
10° Faire sécher les lignes, les détordre au besoin et les re-peloter.

Précisions sur l'emploi de la flèche Delvigne

« L'extrémité antérieure de la flèche est garnie d'une virole semblable de 3 centimètres de longueur, mais de 15 millim. de diamètre extérieur seulement et n'embrassant le bois que sur une longueur de 15 millimètres ; l'excédant de 15 millimètres, resté creux et traversé par une goupille, reçoit un petit lingot de plomb fondu dont le poids peut varier avec sa longueur, suivant le besoin ; il a été porté à 50 grammes pour les flèches qui vont être mises en service.

« Le poids du bois de la flèche est de 80 grammes, celui de la virole de l'arrière de 30 grammes, celui de la virole antérieure de 15 grammes, enfin le lingot en plomb en pèse 50 ; total de la flèche 175 à 180 grammes, soit cinq fois le poids de la balle d'infanterie.

« II est à remarquer que ces dimensions n'ont rien d'absolu : ainsi le bois peut avoir un peu plus ou un peu moins de diamètre ; la longueur de la flèche variera aussi suivant l'arme dont on peut disposer. Pour le fusil d'infanterie, par exemple, dont le canon a 1 mètre 3 centimètres de longueur, il faut porter la longueur de la flèche à 1 mètre 10 centimètres environ.

« En un mot, tous ces détails ont principalement pour but de fournir des données, afin que chacun soit à même d'appliquer le système dans toute sa simplicité, dans beaucoup de circonstances qui peuvent se présenter partout ailleurs qu'au bord de la mer. Un fusil de chasse, une baguette de bois disposée à la hâte et une pelote de bonne ficelle se dévidant de l'intérieur, pourraient déjà rendre de grands services dans les inondations et dans les cas d'incendie.

« A la partie antérieure de la flèche et au-dessous de la virole en cuivre, on attache deux doubles boucles superposées, à bague centrale et formées d'un cordeau de 5 millimètres de diamètre. Pour former ces boucles, on prend des bouts de cordeau de 70 centimètres de longueur pour les boucles supérieures et de 69 pour celles placées au-dessous. Cette différence d'un centimètre a pour but d'égaliser la longueur des boucles quand elles se trouvent rabattues en arrière le long de la flèche.

« L'une des extrémités de ce bout de cordeau est passée en la repliant dans un toron, à 45 centimètres en avant de cette extrémité, repassée à deux torons plus loin, puis passée de nouveau à six torons plus en avant et repassée à deux torons au delà. Les deux extrémités du bout de cordeau sont ensuite réunies par une épissure carrée ou autre ligature solide. On passe alors l'extrémité de la flèche dans la bague formée au centre des deux boucles par leur entre-croisement dans les torons et l'on fait des deux côtés une forte ligature avec du fil goudronné, de manière à ce que la bague soit fortement serrée contre le bois. Les secondes boucles, celles formées du cordeau de 70 centimètres, se placent et se fixent de la même manière par-dessus les premières. Au-dessous de ces deux doubles boudes on entoure ensuite le bois de la flèche d'un coulant de quatre à cinq tours, fortement serrés, du cordeau de 5 millimètres. On emploie, pour faire le coulant, le procédé par lequel on attache l'hameçon à la ligne et qui est connu de tous les pêcheurs et marins.

« La flèche étant ainsi garnie de ses deux doubles boucles et du coulant est prête à être placée dans l'arme.

« Pour lancer la flèche, on met dans le mousqueton une charge de 2 à 2 grammes et demi de poudre de mousqueterie (ou un quart de moins si c'est de la poudre de chasse), et sur cette charge une bourre ou sabot en papier embouti, formant un creux évasé du côté de la poudre. Cette bourre ou sabot, dont les bords évasés se pressent fortement contre la paroi du canon par l'effort de la charge, a pour but d'utiliser tout l'effort de la poudre en empêchant les gaz de s'échapper sur les côtés de la flèche et d'atteindre ses attaches. A défaut de ces bourres spéciales, on les remplace par deux bourres en feutre graissées en usage pour les fusils de chasse, ou enfin par une forte bourre en papier graissé.

« On introduit ensuite la flèche par-dessus cette bourre. La ligne à lancer, à laquelle on a grand soin de ne jamais laisser tara de tors, pour éviter les coques, est lovée eu pelote sur un mandrin conique que l'on retire ensuite. Elle peut se poser à terre près du tireur sans aucune enveloppe ou placée dans une boîte, et son extrémité fixée à quelque objet à terre. Il faut la mettre, autant que possible, à l'abri des effets de l'humidité et de la pluie, le facile dé-videment de la pelote dépendant de ces précautions. Il est encore à remarquer que, soit au bord de la mer où les lames déferlent, soit même avancé dans les brisants pour s'approcher du but à atteindre, il serait impossible au tireur de placer la pelote près de lui ; dans ce cas, de même que pour pouvoir suivre le long du rivage un but mobile entraîné par le vent ou le courant, il est indispensable qu'il puisse porter la ligne dans une boîte suspendue en sautoir.

« Avant de lancer la flèche, le tireur passe le bout de cette ligne en deux ou trois passes dans les quatre boucles réunies de l'attache et la relie au-dessous à la ligne par deux demi-noeuds coulants.

« Cette disposition a pour but d'opposer deux à trois doubles de ligne au choc des boucles, et ensuite de diminuer encore les chances de rupture en laissant du mou à la ligne que la flèche doit entraîner. Il peut être souvent utile d'attacher d'avance les flèches aux pelotes pour éviter tout retard.

« Au besoin le tireur-sauveteur pourrait lancer ainsi deux à trois flèches en une minute.

« Tout étant prêt pour tirer, le sauveteur pointe le mousqueton sous 15 à 25 degrés d'inclinaison au-dessus de l'objet à atteindre, s'il est dans la direction du vent ; à droite ou à gauche en raison des déviations prévues, si le vent vient de côté, et il fait feu.

« II est indispensable de bien se pénétrer ici du phénomène qui se passe pendant le tir, afin d'assurer toujours les conditions nécessaires, puisque tout le système repose entièrement sur sa réalisation.

« A l'instant même où la flèche se met en mouvement, les attaches glissant le long du bois à frottement dur jusqu'au ressaut de la virole placée à l'arrière, entraînent la ligne, dont l'inertie se trouve graduellement vaincue.

« Si cette condition du glissement à frottement dur n'était pas réalisée, le choc briserait infailliblement les attaches. Il faut donc, avant de tirer, s'assurer qu'une assez forte pression de la main est nécessaire pour faire descendre et monter les boucles. Si le frottement n'est pas suffisamment fort, on ajoute quelques tours de ligature, et on refait un autre coulant. Il est toujours utile et quelquefois nécessaire de graisser légèrement le bois de la flèche, afin de favoriser le glissement.

« Quand par la pluie les bagues des boucles et surtout le coulant se trouvent trop serrés, on refait ce dernier pour que la résistance ne soit pas par trop forte et on graisse bien la flèche.

« Lorsqu'il s'agit de lancer une flèche pour porter secours ou pour établir une communication, la première règle à observer est, autant que possible, de tirer dans la direction du vent et d'éviter le vent de travers, quitte à augmenter un peu la distance à parcourir. Par une forte brise de travers, la ligne est toujours emportée et rejetée loin en dehors de la direction du tir; la flèche subit aussi jusqu'à un certain point cette influence, mais il est à remarquer que sa déviation est loin d'être aussi grande que celle des projectiles sphériques, par cette raison que l'action de la ligne sur l'arrière de la flèche faisant incliner sa tête en sens opposé, elle pique dans le vent et dérive moins qu'on ne pourrait croire.

« Il serait impossible, du reste, de donner des règles fixes sur une balistique soumise d'une manière si complète à toutes les variations de force et de direction de la tempête.

« La réflexion, éclairée par l'expérience, devra guider dans l'emploi des moyens.

« Sans nul doute, il eût été désirable d'employer des flèches pouvant flotter ; mais devant être lancées par un mousqueton ou par un fusil, de pareilles flèches seraient trop légères pour entraîner une ligne d'une résistance suffisante.

« Voici, du reste, le moyen d'obtenir un flotteur. M. le comte d'Houdetot a eu au Havre l'heureuse idée de lancer des bouées flottantes entraînées par la ligne. Cette idée peut trouver ici son application de la manière suivante :

« Sur la ligne à lancer et à 12 ou 15 mètres en arrière de la flèche, on enfile à frottement léger dix, quinze ou vingt bouchons de liège, au milieu desquels on a percé un trou au moyen d'un fil de fer chauffé au rouge. Ces bouchons doivent être espacés à des distances de 40 à 50 centimètres, afin d'éviter une trop grande inertie, qui ferait casser la ligne. On les place, couchés tous dans la direction du tir et de manière à ce que la partie de la ligne réservée en avant des bouchons revienne en arrière vers le tireur.

« La flèche lancée entraîne la ligne et successivement tous les bouchons, qui échappent, en glissant, à l'inconvénient du choc. Mais si, au lieu de les placer de cette manière, le premier bouchon à enlever se trouvait du côté du tireur, le choc de la ligne revenant sur eux et les faisant retourner les briserait en partie les uns contre les autres, lors même qu'il ne les ferait pas sauter et se détacher de la ligne. »


Le Pistolet Lance-amarres

Le pistolet lance-amarre , portée 300m, plus simple et pratique, étanche et performant, solide, durable et économique. Il sera utilisé à partir de 1930. Une cartouche de 40mm projette un cylindre métallique flottant accroché à une ligne de vie. Le matériel complet est stocké dans une valise compacte.
Inventé par William Schermuly (1857-1929) vers 1926, il entre en exploitation dans la Société Centrale de Sauvetage vers 1930 et peut être confié à tous.

Pistolet lance-amarres Schermully.