Charles Bénard-Le Pontois - Le drame

Article du Journal du 18 Novembre 1931

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Le commandant Bénard Le Pontois
s'asphyxie
avec ses deux jeunes enfants


Le commandant Bénard Le Pontois photographié avec ses deux enfants, au cours d'une des manifestations qui marquèrent le retour de sa mission au Sahara (lire notre dépêche en 3ème page)

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Le suicide du commandant
Bénard Le Pontois
et de ses deux enfants

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Quimper, 17 novembre. — Le commandant Bénard Le Pontois, directeur du musée préhistorique de Penmarc'h, qui fut récemment à la tête d'une mission au Sahara, s'est suicidé, cet après-midi en s'asphyxiant au moyen d'un réchaud de charbon, en son domicile, à Penmarc'h, avec ses deux enfants, une fillette de 9 ans environ, et un garçonnet de 12 ans.

On attribue cet acte de désespoir à des raisons d'argent.


Charlotte et Jacques avec Catherine Tymen
ép. Monot, leur nounou © Danièle Plouhinec

Article du Ouest-Éclair du 18 Novembre 1931

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UN HORRIBLE DRAME
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UN PÈRE SE SUICIDE AVEC SES DEUX ENFANTS
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Quimper, 17 novembre (de notre rédaction). — Le commandant Bénard le-Pontois, président du Musée Préhistorique de Penmarc'h, et qui, il y a quelque temps, avait été chargé d'une randonnée transsaharienne, avait envoyé à des amis de Paris et à certaines autres personnes de la région, des missives où il parlait de son intention de mettre fin à ses jours.

Deux de ses amis ayant conçu des inquiétudes, s'en vinrent cet après-midi à Pont-1'Abbé. accompagnées du juge de paix de cette localité, ainsi que du chef de la brigade de police.

Ils se sont rendus à Penmarc'h, a 16 h. 30 et ont forcé la chambre du commandant Bénard-le-Pontois; ils se trouvèrent en présence de trois cadavres, celui du commandant lui-même, de sa fillette, âgée de 8 à 9 ans et d'un garçonnet de 12 à 13 ans. Un réchaud à charbon avait été utilisé pour provoquer l'asphyxie.

Dès que la nouvelle de la mort tragique du commandant Bénard-Le Pontois et de ses deux enfants a été connue ce soir, elle a causé dans toute la région la plus intense émotion C'est que le commandant Benard-Le Pontois était un personnage très entreprenant et très connu, et certes, personne ne s'attendait a un tel drame. A Penmarc'h surtout, tout le monde a été stupéfié.

Portant haut, le verbe altier, le commandant Bénard-Le Pontois était l'un de ces personnages que l'on n'aime peut-être pas outre mesure, mais qu'on craint et au fond qu'on admire. Son Institut Préhistorique, il l'avait fondé alors qu'il ne possédait peut-être pas des notions scientifiques appropriées mais il avait su assimiler toutes les données de la science avec une facilité qui tenait du prodige. Il était séparé de sa femme, et depuis quelque temps il donnait l'impression d'un homme désaxé, en butte, au surplus, des embarras d'argent. Voici des détails complémentaires sur sa fin tragique
Le commandant Bénard habitait, avec ses deux enfants, Jacques, âgé de 13 ans, et Renée, 12 ans1, une coquette maison située auprès du Musée Préhistorique à Penmarc'h.


Dimanche soir, vers 9 heures, il s'est rendu avec ses enfants chez son concierge, M. Corrot, auquel il remit trente lettres recommandées, avec mission de rapporter les reçus. L' une était adressée au Procureur de la République, à Quimper, les autres à ses amis de Paris et de province. Il y faisait connaître son intention de se suicider. Lorsque Corrot revint de la Poste, il trouva la maison bouclée, mais ne son inquiéta pas outre mesure croyant son patron parti.

Deux des amis de M Benard, de Brest, M. Chabal et M. Belhommet, en recevant la missive, s’inquiétèrent tout de suite et arrivèrent ce soir a Penmarc'h en auto. Ils trouvèrent toutes les portes fermées.

Ils ne crurent pas devoir ouvrir et vinrent à Pont-l'Abbé chercher le juge de paix M Binen.

A leur retour, la porte fut ouverte et un affreux spectacle s'offrit a leur regards. Les deux enfants étaient morts, étendus dans leur lit. Le commandant Benard était couché sur le parquet entre les deux lits de ses enfants et lui aussi était mort. Dans la pièce était un réchaud qui avait servi au suicide.

Portrait de Ch. Bénard Le Pontois
par R. Cocheril en 1927

Tous les soins furent inutiles pour ranimer les victimes, la mort remontant certainement à plusieurs heures et probablement à dimanche soir. 

 
Note KBCP :
(1) Lire : Jacques, âgé de 13 ans, et Charlotte, 11 ans

 

Article du ouest-Éclair  du 19 Novembre 1931

LE TRIPLE ASPHYXIE SE SAINT-GUÉNOLÉ-PENMARC'H
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NOTRE VISITE À LA VILLA
DU COMMANDANT BÉNARD LA PONTOIS
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Quimper, 18 novembre. (De notre Rédaction.) — Dans notre profession de journaliste, nous avons souvent l'occasion d'assister à des scènes macabres, douloureuses, que ce soient des accidents, des crimes, des autopsies dont la vision remplissent d'horreur ceux qui en sont témoins. On finit à la longue par s'y habituer ou du moins par en prendre son parti. Mais aujourd'hui, au spectacle qui s'est présenté devant nos yeux, dans la petite chambre d'enfant de cette villa de Pors-Carn, au pied de laquelle la mer se brise avec fracas; auprès de ce musée préhistorique construit sur le sol nu de la presqu'île, sous le vent d'ouest qui mugit et fait déferler les vagues sur la torche, une émotion comme jamais nous n'en avons ressentie de pareille s'est emparée de nous comme de tous ceux qui nous accompagnaient. Deux lits d'enfants. Dans l'un, une fillette, dans l'autre, son frère, un garçonnet. Deux innocents qui semblent dormir. Et au pied de ces deux lits, sur le parquet, une masse sombre, recroquevillée, la tête sur le lit de son fils c'est le commandant Bénard-Le Pontois, celui qui, en voulant se détruire, n'a pas craint d’entraîner avec lui dans la mort les deux pauvres petits êtres si charmants qui ne demandaient qu'à vivre. Dans toute la presqu’île de Penmarc'h, ce n'est qu'un long cri d'horreur.

A la villa du commandant Benard Hier, mardi, nous avions parcouru dans la nuit sombre le trajet de Quimper à Saint-Guénolé. Ce matin. par un temps brumeux de novembre, nous sommes retournés là-bas.

Le Musée préhistorique est bâti face à la belle plage de Pors-Carn. A gauche, voici la maison du Commandant, gentille demeure aux volets bleus entourée de murs, devant laquelle stationne une foule nombreuse, composée de femmes et de maris, venue aux nouvelles. Mais personne, sauf les officiels et les personnes accréditées ne peut pénétrer à l'intérieur, car les grilles sont cadenassées et des gendarmes, sous le commandement du chef de brigade Lejeune, de Pontl'Abbé, observent strictement la consigne.

An Ty Didrouz © JL Guégaden

Le Parquet sur les lieux


A 9 heures, un brouhaha se produit dans la foule. Voici une voiture automobile, de laquelle sortent MM. Lhéritier, procureur de la République ; Le Sciellour, juge d'instruction, et Chicart, greffier.

Les magistrats pénètrent dans la villa et, en présence du maire, M. Larnicol, du docteur Veber de Penmarc'h et d'autres autorités, procèdent aux constatations légales.

A la suite de cette Inspection, le Parquet a donné le permis d'inhumer.


Dans la chambre tragique


Nous pouvons pénétrer à notre tour dans la villa. Après avoir traversé une petite pièce, puis une cuisine à cheminée de granit et garnie de meubles bretons, nous traversons le vestibule dont la porte donnant sur la route est fermée. D'abord, un petit salon garni de meubles bretons dont un en forme d’alcôve, contient un lit défait. Des gravures marines, une vieille statue en bois du XVI' siècle, des décorations sous cadres. Et voici la petite chambre où reposent les victimes de cette lamentable tragédie

Un poignant spectacle


Tout respire le calme dans cette pièce où la mort est entrée par la volonté d'un père. Dès l'abord, deux petits lits défaits situés à droite et à gauche d'une fenêtre donnant sur le jardin. Dans le lit de gauche, la fillette Charlotte Bénard Le Pontois, âgée de 12 ans1 (et non Renée, comme on l'a dit hier). Dans celui de droite, le petit Jacques, âgé de 13 ans. Ce sont deux beaux enfants, à la chevelure blonde. Ils semblent dormir sous leurs couvertures qui cependant, sont quelque peu défaites, par suite sans doute des mouvements instinctifs des deux petits malheureux au moment où ils sentirent la mort les étreindre. Un peu de mousse sanguinolente se voit seulement aux narines, résultat de l'asphyxia.

Ce spectacle saisit le cœur. Une immense pitié vous soulève en faveur de ces deux innocents. Et puis voici le père, devons-nous dire le criminel ? Le commandant Bénard Le Pontois est là entre les deux lits, allongé sur le parquet de la chambre, en chemise, la face contre terre, le bras droit replié sous le corps. Devant le bahut formant bibliothèque, deux réchauds éteints et un sac de papier contenant encore un peu de charbon de bois.


Les précautions du père criminel


Le commandant Bénard Le Pontois avait eu le soin de prendre toutes les précautions voulues pour que la mort en ne l'épargnant pas lui-même, n'épargne pas non plus ses deux enfants, et pour que l'alerte ne puisse être donnée avant que tout ne soit consommé.

C'est ainsi qu'il avait eu soin avant d'allumer les réchauds, d'obturer toutes les garnitures des fenêtres et des portes au moyen de papier collé, de façon à empêcher les gaz nocifs de se répandre à l'extérieur. Deux lampes à pétrole qui éclairaient la pièce ont brûlé jusqu'à épuisement complet de leur contenu.


Ce que nous dit le concierge du Musée préhistorique


M. Courrot, concierge du Musée préhistorique de Penmarc'h, a toujours été l'homme de confiance du commandant Bénard Le Pontois. Il est, on peut le dire, inconsolable aujourd'hui. «C'est dimanche soir, nous dit-il, que le commandant Bénard, qui semblait aussi calme que d'habitude, vint me voir au Musée. Il me remit une trentaine de lettres, dont plusieurs recommandées, et me donna l'ordre d'aller les remettre à la poste de Quimper. Il ne voulait pas les remettre, je ne sais pour quelles raisons, à la poste de Penmarc'h.

« Je partis donc à bicyclette le lundi matin, à 6 heures, pour Quimper où je fis les opérations. A mon retour, vers 15 heures, la maison était close. « Je ne m'en inquiétais pas autrement parce que le commandant m'avait bien recommandé de ne point le déranger. Je croyais, du reste, qu'il était parti avec les deux enfants. Ce n'est que le lendemain, mardi, comme vous l'avez dit hier, qu'arrivèrent de Brest, vers 15 heures, MM. Chabal et Belhommet, auxquels des lettres avaient été adressées comme aux autres. M. Bizien, juge de paix à Pontl'Abbé, mit les scellés jusqu'à l'arrivée du Parquet. »


Le musée préhistorique


Nous avons dit que le commandant Bénard le Pontois avait fondé l' Institut finistérien d'études préhistoriques, présidé par M. l'amiral Motet. Cet Institut devait pratiquer des fouilles dans le Finistère et restaurer des monuments historiques de ce département, à la pointe de Penmarc'h où se trouvent actuellement entassés des documents recueillis dans la région finistérienne.

Par arrêté du 18 mai 1925, les collections présentes et à venir du Musée de Penmarc'h étaient classées parmi les monuments historiques. Mais l'activité sans cesse grandissante de l'association enrichissant continuellement le Musée de Penmarc'h obligea à envisager de nouveaux agrandissements. En janvier 1928. l'Institut finistérien soumit a 1'Administration des Beaux-Arts un projet de construction de six nouvelles salles.

Or écrivait M. le sénateur Chastenet, rapporteur du projet des Beaux-Arts, ce projet, dont la réalisation entraînera une dépense de un million environ a été reconnu indispensable pour permettre au groupe finistérien de poursuivre son but. "Mais l'Institut Finistérien n'a pas borné là son effort.

En 1929, dans la presqu'île de Crozon, à Lagatzar2, ont été relevés et replacés sur leurs anciens calages des alignements abattus par un très ancien séisme, dit-on.

En somme terminait l'honorable sénateur, l'aide financière que l'Etat apporte à l'Institut finistérien se justifie d'autant plus que par un acte de rare désintéressement, cette association vient de décider de lui faire don de l'ensemble des constructions qui lui appartiennent et des collections qui s'y trouvent renfermées. "

Ajoutons enfin que le commandant Bénard le Pontois avait succédé au docteur Capitan, comme titulaire de la chaire de préhistoire au Collège de France.


Note KBCP :
(1) Lire : la fillette Charlotte Bénard Le Pontois, âgée de 11 ans
(2) Lire : Lacatjar


Article du ouest-Éclair du 20 novembre 1931

La tragédie
de St Guénolé-Penmarch

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Les obsèques du commandant
Bénard Le Pontois.
Celles de ses deux enfants


Il faisait beau, en cet après-midi de novembre, lorsque pour la troisième fois, nous sommes allés dans le bourg de Penmarc'h, l'animation se faisait peu à peu sentir en raison des événements.

Un soleil d'arrière-saison éclairait faiblement l'agglomération, dorant la vieille église et les maisons du bourg. Comme on peut le deviner, toutes les conversations roulaient sur le drame épouvantable de la villa de Pors-Carn. Le Commandent Le Pontois était tellement connu !!

Nous devons à la vérité de dire qu'au bourg comme à St Guénolé, l'impression concernant le commandant se révèle identique ; on ne l'aimait point, c'est entendu et son geste monstrueux a soulevé l'horreur unanime.


L'inhumation du commandant Bénard

Hier, nous avons dit que Mme Bénard ne voulait pas que ses enfants fussent inhumés en même temps que leur père et dans le même emplacement. On comprendra, n'est-il pas vrai, les raisons majeures qui motivèrent cette décision.

Ainsi donc, cet après-midi, à 13 h, une camionnette s'est arrêtée devant la villa de Pors-Carn. Le cercueil du commandant Bénard Le Pontois a été embarqué dans le véhicule et celui-ci l'a transporté aussitôt au bourg de Penmarc'h, puis directement au cimetière, situé non loin de la vieille église. Une fosse avait été creusée au pied de la croix de la mission où, comme le disait la lettre reproduite par nous hier, il avait acheté une concession pour lui et pour ses jeunes enfants. Aucune cérémonie religieuse, bien entendu.

Auprès de la croix, une cinquantaine de femmes et quelques hommes. Il y a là deux de ses fidèles amis, MM. Chabal et Belhommet, de Brest. Ce sont les seuls.

Le cercueil a été déposé dans la fosse et bientôt les fossoyeurs jettent une dernière pelletée.

Une superbe couronne de chrysanthèmes a été déposée par M. Chabal. Elle porte l'inscription suivante « L'Institut Finistérien d'Etudes Préhistoriques, à son regretté Président ». Sur le tertre, garni de deux palmiers nains, elle constitue le seul hommage rendu la mémoire du Commandant Bénard Le Pontois.

Et cependant, voici que plusieurs femmes, des bigoudennes aux coiffes blanches, sont agenouillées instinctivement au pied de la croix, pour prier. Une voix, celle d'un des amis du défunt, nous dit sa rancœur de voir enfouir ainsi au milieu de l'abandon général, « celui qui comptait tant d'amis. Nous ne sommes plus que deux », ajouta-t-il tristement. Plus loin, à l'emplacement acheté hier par Mme Bénard, on creuse une autre fosse, une fosse très large où les deux enfants dormiront côte à côte leur éternel sommeil.

C'est M. Le Dréau, fossoyeur qui, hier, s'est entendu à ce sujet avec Mme Bénard Le Pontois. Ainsi, conformément à la volonté de cette dernière et malgré les dispositions ultimes du père, les deux enfants ne voisineront pas avec celui qui n'hésita pas à sacrifier leur existence avec la sienne.

Les obsèques des deux enfants


Un peu plus tard, avaient lieu les obsèques de Jacques et Charlotte Bénard Le Pontois, les petites victimes innocentes de ce terrible drame.

La levée du corps fut faite a 14 h. 30 par M. l'abbé Colin, vicaire a Penmarc'h.

Les deux cercueils furent embarqués dans le char funèbre. Et bientôt, précédé du clergé et de quatre croix, le cortège se dirigeait vers le bourg a travers la campagne, à destination de l'église. Il comprenait notamment M Larnicol, maire de Penmarc'h ; Fourmaux, gérant d'usine ; Béléguic, de Douarnenez ; le docteur Lagriffe, de Quimper ; plusieurs personnalités de la région, ainsi que de nombreuses femmes de Penmarc'h.

Plusieurs jeunes filles portaient de superbes gerbes de fleurs naturelles blanches. Mme Bénard et ses parents suivaient en taxis automobiles.

La cérémonie religieuse fut célébrée par l'abbé Cadiou, recteur de Penmarc'h.

De l'église au cimetière tout proche, les deux cercueils furent transportés à bras, celui de la fillette par quatre jeunes filles de Penmarc'h, celui du garçonnet par quatre jeunes gens. Après les prières rituelles, la foule se retira, profondément émue. Nous venions d'assister aux deux cortèges combien dissemblables !! C'était comme la synthèse du drame de Pors Carn. Chacun s'en rendait bien compte, de sorte qu'une senteur lourde d'émotion se dégageait de ce champ de repos.

Ce qu'on dit dans la contrée

L'émotion causée tant à Penmarc'h que dans la contrée par le drame de Saint-Guénolé, n'est évidemment pas encore calmée. Nous avons dit hier que le commandant Bénard Le Pontois avait certainement prémédité lucidement, froidement son acte abominable. Le fait n'est pas douteux. Au cours de nos pérégrinations au Bourg de Penmarc'h, nous avons appris une nouvelle pour le moins stupéfiante mais qui n'en est pas moins réelle. Au cours de l'un des derniers jours de la semaine passée, le commandant Bénard vint à la messe du matin avec ses deux enfants. Ceux-ci qui avaient l'air profondément tristes se confessèrent et communièrent. Le commandant Bénard voulut voir le prêtre après la cérémonie religieuse. Le recteur, M. Cadiou, pleurait à chaudes larmes en lui serrant la main. « Les prières des enfants, dit le commandant, ont plus de poids que les nôtres. Elles seront pour moi d'un grand secours dans les vicissitudes où je vais passer. »


Naturellement jamais le recteur de Penmarc'h n'a pu soupçonner le dessein du père criminel. Il y a là cependant une nouvelle preuve de la préméditation.

Le père qui craignait de les perdre — sans doute leur pension de 200.000 francs avec eux — n'a-t-il pas mis tout en oeuvre pour leur faire accepter l'idée de la mort ? C'est possible.

Une situation dramatique

Dans l'instance de divorce en cours entre M. et Mme Bénard, il fut question, on peut le penser, du sort des deux enfants. Il est bien incertain que Mme Bénard, qui a un grand fils issu d'un mariage précédent, s'intéresse beaucoup aux deux petits. Lorsqu'elle venait Penmarc'h elle avait pour eux les attentions les plus généreuses et plutôt maternelles. On dit qu'un arrangement à leur sujet n'avait pas été prévu dans la procédure de divorce. La mère aurait pris avec elle la fillette, tandis que le père aurait gardé le fils. On ajoute que les deux enfants n'étaient pas du tout d'accord sur cette procédure et qu'ils préféraient demeurer avec leur père.

Y a-t-il une part de vérité dans tout cela ? En tous cas, il est difficile d'admettre, comme nous le disions hier, que les deux enfants aient donné leur consentement à l'horrible drame qui a amené leur mort.

Il y a un mois

Quoi qu'il en soit, la responsabilité du commandant Bénard Le Pontois, en ce qui concerne la préméditation, est hors de doute. Il y a environ un mois, Mme Tymen, sa bonne, découvrit un sac de charbon de bois dans la chambre. Elle voulut s'en servir pour allumer son fourneau, mais le commandant l'en empêcha : « N'y touchez pas, dit-il, ce charbon appartient au Musée. » On sait que l'asphyxie fut provoquée par deux réchauds de charbon de bois.

Le commandant Bénard Le Pontois a-t-il asphyxié d'abord ses deux enfants puis est-il venu se placer entre les deux lits en allumant un deuxième réchaud ? Nous ne le saurons sans doute jamais.

Que va devenir le musée

La question se pose de savoir ce que va devenir le Musée Préhistorique de Penmarc'h à la suite de la mort du commandant Bénard le Pontois. Nous avons appris, aujourd'hui, que Mme Bénard avait l'intention de conserver ce souvenir précieux à divers points de vue et de veiller pécuniairement à sa prospérité. Ainsi sera sauvegardée une œuvre entreprise sans doute avec quelque témérité par un homme doué de beaucoup d'audace, œuvre qui n'en est pas cependant moins digne d'intérêt.

Au cimetière du bourg de Penmarc'h

La tombe de Jacques et Charlotte Bénard © JL Guégaden

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La tombe anonyme de Charles Bénard du Pontois © JL Guégaden


Comme souvent en Pays Bigouden, les événements mémorables de la vie locale, faisait l'objet d'une complainte relatant les faits. Les paroles étaient le plus souvent greffées sur la mélodie d'une chanson populaire à succès. Les « Pauvres gosses » n'y échappèrent pas...

La complainte