Les Bigoudens De Pont-L'Abbé 
Et Les Pêcheurs De Penmarc'h Et De La Baie D'Audierne (Suite)


-- 484 --




-- 485 --

Un péristyle de trente-quatre marches, n'est pas d'une mesquinerie bourgeoise, bien certainement.

Quel architecte eût osé présenter à un parvenu, plusieurs fois millionnaire, le plan de cette maison fantastique ?...

Un artiste seul pouvait avoir rêvé cette propriété et l'avoir réalisée, n'épargnant ni ses peines ni sa fortune, faisant disparaître toutes les difficultés naturelles et pécuniaires, obtenant un résultat tel, que le Petit Journal par un article du 7 avril dernier, crut devoir faire connaître à son million et demi de lecteurs, que la Nature avait été domptée et que sur ce sol granitique et rocheux de Penmarc'h, la culture du raisin avait été tentée.

L'homme qui fit cela, n'est pas le premier venu : M. Gustave Salavy, dont le public parisien n'a pas oublié les livres à sensation, M. Salavy au sujet duquel dans l’Éclair du 12 juillet 1892, je retrouve à l'occasion d'une de ses œuvres « Jacques Renod » pamphlet dans lequel les mœurs de l'Allemagne étaient fustigées, - le compte-rendu de ce qui se passa en 1872 lorsque les éditeurs effrayés de la témérité de l'écrivain, refusèrent de la faire paraître. L'auteur ne se décourage pas, il dédie son livre au tsarevitch, aujourd'hui le tsar, et, le 4 septembre 1873, il en reçoit une acceptation de dédicace. Gustave Salavy, dis-je, s'est joué des difficultés présentes, comme il avait triomphé de celles qui lui furent créées à cette époque.

Ses serres, d'une superficie de plus de 8.000 mètres carrés, tellement vastes qu'on peut les labourer à la charrue, sont établies dans le roc même qu'il fit sauter à la dynamite et qu'il combla d'un sol factice. J'y ai vu des vignes de deux ans, d'un aspect superbe et en plein rapport, présage heureux des résultats futurs. Ces serres, que l'écrivain avec une cordialité parfaite, a bien voulu ouvrir aux touristes, ne sauraient être décrites. Je préfère laisser aux visiteurs toute la primeur des impressions qu'ils pourront en rapporter. Je dirai simplement, que par un procédé spécial, on pourra encore, à Paris et à Nice, manger en janvier et en février, du chasselas de Thomery et de Fontainebleau, de Penmarc'h, ce qui n'est pas banal !...

Avant de passer à la description intérieure de la Villa, qui n'est visitable que pour les nombreux amis de Gustave


-- 486 --


Salavy, je crois devoir faire remarquer que les magnifiques lampadaires du grand escalier, proviennent des Tuileries, et que les six mascarons qui décorent la façade, formaient dans ce palais, les clefs de voûte de la salle des Maréchaux.

Je n'ai pu céler à M. Salavy que mon admiration pourrait m'entraîner à de laudatives indiscrétions sur son intérieur. Il ne s'est pas ému de cette menace et m'a convié à contempler ce rêve, à le palper, à y vivre. Aussi vais-je tâcher d'en donner aux moins favorisés, une idée qui, je le sens, sera bien au-dessous de ce que j'ai constaté.

Bizarreries, hardiesses, contrastes; il y a de tout cela dans cet édifice. Et cependant rien ne choque la vue, ni ne blesse les règles des proportions et de l'ameublement.

Mais avant de parler de l'intérieur, je vais, comme faisant partie intégrale des serres, parler des citernes qui par milliers de mètres cubes, déversent leurs eaux pour l'arrosage des plantations. Le derrière de la maison, orné d'un escalier bien moins important que celui de la façade, a tout au long, trois citernes de sept mètres de profondeur, creusées dans le roc, sans la moindre infiltration d'eau saumâtre, et dont le haut forme un grand réservoir cimenté. Une pompe hydraulique monte l'eau jusqu'à un système spécial qui la distribue dans les serres. Ces citernes non couvertes, ne sont utilisées que pour l'arrosage.

Les terrasses de la Villa, sont creuses, et ne sont autre chose que d'autres citernes couvertes- pour les besoins journaliers, - établies également dans le roc, et qui ont une profondeur de quatorze mètres, sur une surface de six mètres. L'arrosage et l'alimentation, on le voit, sont assurés, même par les plus grandes sécheresses.

Revenons aux beautés intérieures, car cette masse d'eau m'ècrase littéralement et me pousse malgré moi, à des évaluations par trop absorbantes.

Dès le seuil on est stupéfait de ne voir aucun vestibule. De plein pied, tous les appartements se communiquent. D'abord voici le fumoir, sorte de musée ou des armes de prix, des toiles signées J. Dupré, Verler, Lambinet. etc... indiquent la maison d'un penseur. Le salon a un cachet bien spécial avec sa cheminée en marbre blanc délicatement œuvrée, sa garniture artistique, sa glace monumentale, et



-- 487 --


surtout cette vue incomparable de la mer, cette sensation de l'air du large, qui y entre par les baies grand'ouvertes ; tout contribue à me griser, et ma griserie ne fera que croître jusqu'au moment où, sur la plate-forme, la réaction violente d'une atmosphère réfrigérante m'exilera du pays des chimères.

Dans le salon, un beau portrait du maître, œuvre d'un de ses amis (Henri Regnault) dont une main est inachevée par suite de la mort du peintre. D'autres inestimables toiles de Diaz, Daubigny, G. Courbet, Ribot fils, etc., etc... Un buste en terre cuite, représentant M. Gustave Salavy fils, enfant, et j'ai eu l'audace, moi qui l'ai connu adolescent, d'affirmer à ses parents que de toutes les photographies qu'ils m'ont montrées du futur capitaine au long-cours, celle-ci est la seule vraiment ressemblante. Et ils ont souri, parce que c'est la vérité, parce qu'il est des natures qui demeureront primesautières jusqu'à un âge avancé, malgré les actions courageuses qu'elles ont commises, et tout en acquérant le posé qu'exige la situation.

Une particularité qui s'impose parce qu'elle est princière et en dehors des usages de nos plus riches châteaux de Bretagne, c'est que sur toute cette immense largeur d'appartements, le plancher disparaît sous le même tapis ; pas un coin du parquet ne se laisse deviner. Ce détail luxueux, me dispense de m'étendre sur les richesses des mobiliers de différents styles de toutes ces pièces.

J'y ai vu par exemple deux plafonds qui ne dépareraient pas un musée : Les Trois Grâces, de J. B. Regnault, toile copiée par Dubouchet, prix de Rome, et Vénus naissant des flots, de Cabanel, copie du même Dubouchet. Je glisse sur les bibelots artistiques et coûteux que je rencontre de ci, de là, uniquement pour ne pas effaroucher la modestie du propriétaire. Mais je ne suis pas étonné, étant donné les difficultés qu'il a eues à Vaincre, le confort de l'habitation et des serres, la façon dont les appartements sont meublés, que bien près d'un million ait été englouti dans cette gigantesque entreprise. Et Gustave Salavy parle de cela comme d'un caprice satisfait, d'une oasis lui rappelant ses excursions dans le Sahara ou périrent tant d'explorateurs et dont il est heureusement revenu.

Ces serres il les a créées à titre d'expérience et d'originalité,



-- 488 --


mais aussi pour y retrouver cette température des tropiques...; ces terrasses il les a fait faire pour avoir encore l'illusion comme du haut d'un minaret, d'un désert insondable d'eau, à défaut des sables brûlants. Son idéal est atteint et l'écrivain abandonnant devis, lavis et ses fonctions d'architecte, va reprendre son œuvre éminemment littéraire.


Tout en parlant un peu de tout, des chefs de nos différentes écoles littéraires, dont, entre parenthèses Zola n'a pas ses sympathies, bien que lui-même soit l'un des précurseurs de ce genre, de notre très regretté Maupassant, de Loti, de nous et des autres, nous nous trouvons dans la cave, vaisseau immense, semblable à une nef de cathédrale comme hauteur et largeur.

Vous dirai-je que la plate-forme est tout simplement délicieuse, qu'on y jouit d'un introuvable panorama, qu'on y respire... largement, et qu'une table de quarante couverts y est installée simplement, naturellement. comme on en dresse sur le dessus d'un mail-coach ?... Non, n'est-ce pas, je donnerais à quelques-uns des regrets de ne pouvoir visiter toutes ces belles choses, et surtout celles dont je ne parle pas...

Et moi, méchamment, durant cette promenade à travers ces pièces grandioses, je savoure ma vengeance... Vous ne m'eussiez pas cru aussi perfide,n'est-ce-pas ?... Eh bien ! ma vengeance sera de pouvoir dire aux détracteurs de Penmarc'h et de sa vaillante population, en montrant la propriété de G. Salavy, en m'appuyant sur son impression bien personnelle sur le pays:

« Voilà une propriété qui a coûté près d'un million, un homme qui n'est certes pas vulgaire ; si le pays eût été habité par des pirates et des bandits, s'il eût été aussi malsain qu'on le prétend, est-ce que l'écrivain Salavy y eut planté, ce qu'en souriant il appelle « sa tente » et surtout une tente de ce prix ?...

Allons donc !!!

Vis-à-vis est la côte rocheuse.

Il est facile de voir par les rocs tourmentés de cette côte, et par ceux que la vague a curieusement fouillés en rocaille,



-- 489 --


et qui se trouvent sur la terre ferme, que la mer dut, autrefois, s'étendre fort avant sur ce territoire.

Près d'une maisonnette bâtie sur les rochers et qui sert d'atelierà un peintre de marines, M. Paul du Châtellier, élève distingué de Gudin, est le gouffre de Toul-Ifern (Trou de l'Enfer) au-dessus duquel est la roche dite des Cinq-Victimes, de ce que la famille du Préfet Le Vainville fût enlevée par une lame de fond et précipitée dans l'abîme. Pour perpétuer le souvenir de ce fait, unique dans les annales nécrologiques de la mer de Penmarc'h, on avait élevé une croix qui fut emportée par le vent ; on dut en faire sceller une en fer dans la roche même et graver l'inscription dans le granit :

AUX CINQ VICTIMES
DU 10 8bre 1870

A quelques mètres plus loin, est une baie dont les rochers blanchis par les lames, ont, à la marée montante, une teinte cadavérique du plus tragique aspect.

Voyez-vous maintenant cet énorme rocher fendu en deux : c'est le saut du Moine. La légende dit que Satan sur ses vieux jours s'étant repenti, se retira sur cette côte, parce que tout en y vivant en ermite, il pouvait égayer sa réclusion en commettant de petites méchancetés, telles que de s'emparer des âmes des malheureux morts en état de péché, dont la mer apportait les corps rigides dans ces parages. Un jour il aperçut une jeune fille merveilleusement belle, sorte de fiancée de la mer, qui se complaisait à vivre sur ses bords, à se laisser bercer par la lame, semblable à un gigantesque coquillage rose et nacré qu'eut apporté le fot, ses cheveux blonds flottant comme autant d'algues animées. Longtemps l'ayant contemplée, il voulut s'en emparer et il la poursuivit jusqu'à ce roc qu'elle escalada et sur lequel il la rejoignit. Il l'allait saisir lorsque, faisant un signe de croix, la jeune fille sauta sur l'autre bord. Le rocher se fendit et le faux moine fut englouti dans les lames vengeresses. Son corps fut rejeté au rivage où il se pétrifia. On voit à quelque distance de là, un rocher qui vu de la côte, présente la silhouette d'un moine, le capuchon rabattu sur la face et les mains jointes.

Est-ce ce rocher qui a donné lieu à la légende, ou y a-t-on



-- 490 --


vu un indice quelconque d'une vengeance céleste? Ou encore ne serait-elle une variante de la légende du Moine de l'Enfer de Plogoff, qui, lui aussi, mais après une vie honnête, dort de l'éternel sommeil sous la forme d'un monolithe à l'aspect monacal ?

On dit encore qu'au temps ou les Moines rouges (les Templiers) étaient à Kérity, ils venaient souvent sur ce rocher pour surveiller la mer. Ils avaient commencé à y sculpter des banquettes (qui, paraît-il, existent au haut de ce bloc) lorsque l'un d'eux, impatienté par les lenteurs de ce travail, voulut faire sauter le couronnement à l'aide de la poudre. Le rocher se fendit en deux et l'imprudent fut noyé.

Le soir, lorsque la lune répand sa pâle clarté sur ces blocs émergeant des blancheurs écumeuses des vagues clapotantes, le spectacle est saisissant, véritablement effrayant.

Tout cela se meut, se peuple, les rochers affectent des formes fantastiques, chaque relief se dessine hardiment, s'estompe et s'avive de lueurs blafardes, et on y voit des silhouettes d'animaux inconnus, des ébauches de corps monstrueux, des peuplades d'ennemis hérissés et menaçants qui surgissent de toutes parts.

On sait que ce sont les rochers qu'on a déjà vus, sur lesquels on s'est assis et cependant on se sent troublé, inquiet, comme d'une exploration dans un pays fantastique. Malgré soi, on est attendri, on palpite, on tremble, empreint de ces sensations qu'un moindre incident imprévu fait naître. Une houle un peu plus forte retombant d'un bruit sec, comme la détente d'une arme à feu; le stridement d'un oiseau de mer, répercute comme un signe de ralliement de troupes ennemies ; une pierre qui s'écroule dans un gouffre, avec un grand bruit sourd comme celui d'un corps jeté là après un crime; tout ici provoque une émotion indicible.

Puis lorsqu'on approche de ces géants de pierre, on s'aperçoit que le grand fantôme dont le bras menaçant s'étendait vers la côte comme une suprême malédiction n'est qu'un rocher que surmonte un autre plus aigu, auquel le lichen gris donne une teinte linceuleuse : que la grosse grenouille entourée de ses trois petits, baillant tous une énorme bouche ; nous les avons vus tantôt rochers paisibles comme le



-- 491 --


moine et le gros saurien qui est à l'angle de la Villa des Goélands.

Et la mer, par ces temps de calme, se teinte multiplement de lueurs phosphorescentes qui, en longs serpents de feu se roulent et se perdent dans les blancheurs cylindriques des crêtes et dans le noir de la masse immense qui grouille avec une précision automatique, comme mûe en dessous par de gigantesques pédales, activées par d'inconcevables pistons, capables de soulever un monde....

Plus loin est la Grotte de Philopex. Ici sont encore accrochées quelques légendes :

La plus ancienne remonte au temps des écumeurs de la côte. Une sorcière habitait cette grotte en compagnie d'un bouc, sur lequel elle entreprenait des courses vertigineuses, telles que de se rendre à Rennes et d'en revenir en vingt-quatre heures. C'était la sybille de ces lieux, celle qui par ses pratiques mystérieuses était censée amener les tempêtes et attirer les navires en vue de la côte. Les vieillards prétendent que les pilleurs d'épaves se réunissaient dans sa grotte et, qu'après avoir récité certaines formules, on y allumait un cierge de cire jaune qu'on laissait consumer à moitié et qu'on portait ensuite devant la statue de Saint-Gwénolé, pour se rendre ce patron de la côte, favorable.

La seconde légende est plus récente : Une tempête déposa un jour sur un des îlots de l’Île Fougère, une carcasse de navire qui s'y fixa on ne sait comment. Des marins s'embarquèrent pour s'en emparer, mais ils ne revinrent jamais...pourtant ils n'avaient pas péri en mer, puisque leur embarcation demeurée intacte, fut retrouvée le lendemain attachée au port... Qu'étaient-ils devenus ?

Un second détachement partit à la découverte vers cette carcasse de navire qui se maintenait toujours en même état. et ne paraissait pas devoir venir d'elle-même à la côte. Les hommes ne reparurent plus, mais leur barque comme la première, fut ramenée à terre on ne sait comment.

Enfin, un enfant qui en jouant s'aventura vers l’Îlot, dans un bateau qu'il avait détaché de la rive conta quelques jours après sa dangereuse escapade, qu'il eut péri, son bateau ayant touché le roc, si un géant ne fût venu à son secours ; après l'avoir soigné, réparé le bateau qu'il mit en



-- 492 --


état de regagner la côte, il vint lui même l'y conduire et repartit à la nage. Cet être mystérieux vivait sur l’îlot et puisait dans la cargaison de l'épave, ce qui était nécessaire à sa subsistance. Il n'avait, dit-on. qu'un œil comme les Cyclopes, dont du reste il avait les instincts de piraterie.

Les habitants de la côte de St- Gwénolé, justement effrayés de ce voisinage, mais bien trop prudents pour s'aventurer sur son domaine, attendirent que la faim mit le géant à leur discrétion. A quelque temps de là, trois vigoureux marins l'aperçurent endormi sur le bord de son île ; ils firent avancer leur barque et s'approchèrent, espérant s'emparer de sa personne. Le géant se réveilla au moment où ils allaient le ligoter ; il les saisit tous les trois et les serrant dans ses bras de fer, leur brisa les reins d'une seule pression. D'autres marins qui de leurs barques avaient assisté à cet exploit, s'empressèrent de gagner le large.

Dans leurs conversations, ils appelèrent cet étrange personnage : Philopen, ce qui voulait dire homme fort. En Bretagne, il n'est pas rare de voir les mots se dénaturer et former de nouvelles consonances. Un journal régional, qui se pique cependant de littérature, dénomme bien Méphistophélès, sous ce nom baroque et incompréhensible de Mésophéphélès !...

Il n'y a rien d'étonnant à ce que ces marins, voulant comparer cet étranger au robuste chef de la Ligue archéenne, Philopœmen, en eussent fait Philopen, d'où est dérivé Philopex, qui, à leurs yeux, - même maintenant, - fut un homme doué remarquablement sous le rapport de la force, un second Milon de Crotone.

Lorsqu'il eût épuisé ses provisions, Philopen se vit obligé de venir à terre. On le vit un jour étouffer une vache de ses bras musculeux et l'emporter sur ses épaules, tout en nageant jusqu'à son île. Il proposa aux marins de soutenir une lutte avec trois des plus forts d'entre eux, moyennant quoi, ils lui laisseraient droit de parcours sur tout le territoire. Il terrassa ses adversaires et d'autres lutteurs de profession, attirés par ses hauts-faits. Ce que voyant, ces hommes le choisirent pour roi, mais il ne voulut pas en accepter les charges et il se contenta de se laisser nourrir par eux, leur prêtant au besoin le secours de sa force. On le vit



-- 493 --


dès lors venir fréquemment à terre, et faire d'une excavation de rochers, sa demeure passagère ; c'est à cette grotte qui servit de refuge a Fontenelle lorsqu'il vint ruiner Penmarc'h, que les habitants ont conservé le nom de Philopen.

Ici s'arrête cette légende, incomplète comme la plupart de nos récits bretons. Personne ne sait ce que fit ce roi des hommes de la côte, à quelle époque exacte il vécut, ni comment il mourut. On n'a souvenance que de ses exploits herculéens...

Toutefois, une vieille dame de 84 ans, qui a conservé une prodigieuse mémoire des faits de sa jeunesse, m'a dit avoir entendu il y a au moins soixante ans, le père de son mari, dire que dans son enfance il avait vu le fils de Philopen, un géant aussi, qui venait à Pont-l'Abbé en portant sa femme sur son dos.

Peu de côtes possèdent autant de légendes que celle de Saint-Gwénolé. Ce qui précède est réparti sur un espace de 200 mètres au plus, et nous ne sommes pas encore arrivés ni à l'anse de Pors-Carn où s'échouent tous les cadavres de cette mer indomptée, ni à cette redoutée pointe de la Torche, où la mer s'enfournant dans un rocher creux, fait entendre un long et perpétuel mugissement qui, par les jours de tempête, se perçoit à huit lieues de là...

--/--