1899 - Naufrage du Saint-Jean (suite)

Voici les faits relatés dans les articles de certains journaux locaux.


Journal «La dépêche de Brest» du 31 Décembre 1899

Un vapeur coulé au Guilvinec

Le « Saint-Jean », du Havre. — Sept victimes


Dans la matinée d'hier, le bruit s'est répandu assez rapidement dans Brest qu'un vapeur coulait au Guilvinec.

L'émotion était d'autant plus grande qu'on n'avait que des détails absolument vagues. On ignorait et la nationalité du navire et le nombre des hommes montant le bâtiment.

Vers onze heures, la préfecture maritime, à Brest, recevait la dépêche suivante, envoyée par le sémaphore de Lervily :

« Un vapeur coule sur la roche Men-Mouston, à deux milles sud-ouest du sémaphore de Lervily.

« On voit l'équipage dans la mâture.

« Un bateau de sauvetage se dirige sur les lieux. »

Ce laconisme du télégramme ne pouvait qu'ajouter à l'anxiété générale.

Vers une heure de l'après-midi, un nouveau télégramme arrivait de Penmarch à la préfecture maritime. Il était, cette fois, un peu plus rassurant :

« Le canot de sauvetage Comte et Comtesse Foucher de Saint-Farron est parti porter secours au vapeur couché sur les roches Kammouk1, dans le nord-ouest du Guilvinec. La mer est affreuse. Le sauvetage est mouvementé. L'équipage est réfugié dans la mâture.

« Le canot fait route sur le Guilvinec avec les naufragés sauvés. »

C'est juste à ce moment que le bruit s'était répandu que le bâtiment en perdition était anglais.

Il n'en est rien, ainsi que venait l'apprendre le télégramme suivant, reçu par la préfecture maritime :

« Le vapeur signalé ce matin est le Saint-Jean, du Havre, de la Société navale de l'Ouest, venant d'Anvers avec diverses marchandises, se rendant à Lisbonne.

« Il s'est perdu à deux milles dans le sud-ouest de Lesconil.

« Il était monté par 18 hommes d'équipage.

« Quand le canot de sauvetage arriva sur les lieux, il ne secourut que onze hommes. Les autres, perchés dans la mâture, ballottés par la tempête, furent enlevés par des coups de mer.

« Parmi ceux-ci se trouvent le capitaine, M. Guillou, et son second.

« Un des matelots a été tué par chute du mât de charge.

« Les survivants ont été sauvés après une deuxième sortie du bateau de sauvetage et conduits au Guilvinec. »


Note KBCP :
(1) Le naufrage a eu lieu entre Rousse ar Kammouk (ou Rousse ar C'hammou) et Pellenic.


Naufrage du sait-Jean sur la roche Kammouk (Photo montage) © JL Guégaden

Journal «La dépêche de Brest» du 2 janvier 1900


Le naufrage du « Saint-Jean»


Voici de nouveaux détails sur le naufrage du vapeur Saint-Jean, perdu dans les dramatiques circonstances que nous avons déjà dites :

« Le 30 décembre, vers 8 h. 30 du matin, les guetteurs de Penmarch et de Lesconil signalaient aux deux stations de sauvetage voisines, Lesconil et Kérity, qu'on apercevait un vapeur coulé sur un plateau de roches, à environ deux milles sud-ouest du Guilvinec, avec son équipage réfugié dans le seul mât qui leur restait.

« En un clin d'œil, les canots furent prévenus et mis à l'eau avec une rapidité étonnante. A 9 h. 35, le canot de la station de Kérity, «Comte et comtesse Foucher de Saint-Farron», accostait le bâtiment après avoir été plusieurs fois couvert par la mer. Il réussit à sauver les neuf survivants et à prendre un mort qui restaient à bord. Ce dernier avait succombé par suite de ses blessures et par le froid. C'était le second mécanicien du bord, qui, en quittant sa cabine, avait été pris entre le mât de charge et le bord, où il avait reçu une blessure horrible. Malgré tout, il avait eu le courage de monter dans la mâture, d'où il tomba à la renverse cinq minutes après en disant : « Je meurs ! » Il était tombé en travers, et il s'était brisé la colonne vertébrale.

« C'est là qu'il fut trouvé mort, les pieds engagés dans les cordes, la tête en bas.

Le capitaine avait, depuis deux jours, la jambe cassée par les compas et leurs accessoires, dans un coup de mer au large d'Ouessant.

« Tous les marins sauvés parlent le breton. Ils paraissent, d'après leur accent, être des marins du littoral situé entre Morlaix et Brest.

« Le Saint-Jean, du Havre, jaugeait 551 tonneaux ; il était chargé de diverses marchandises. »


Journal «Le Finistère» du 3 janvier 1900


LESCONIL.

— Naufrage d'un vapeur. — Sept hommes engloutis.
— Dévouement des sauveteurs

— Dans la nuit du vendredi au samedi dernier, le vapeur «Saint-Jean», du port du Havre, jaugeant 800 tonneaux, appartenant à la Société Navale de L'ouest, monté par 18 hommes d'équipage et venant du port d'Anvers à destination de Lisbonne, a donné sur la roche des Fourches, à deux miles au sud-ouest de Lesconil et a sombré presqu'aussitôt. La mer était absolument démontée et la tempête sévissait dans toute sa violence.
Une partie de l'équipage pût se réfugier dans la mâture qui émergeait encore. Le bateau de sauvetage de Kérity-Penmarc'h se porta en toute hâte au secours des naufragés et réussit, non sans courir de grands dangers, à recueillir 11 des hommes de l'équipage et un mort. Les 6 autres, parmi lesquels le capitaine, avaient disparu. Voici d'ailleurs, sur cet événement des détails recueillis de la bouche des témoins :
Le 29, vers 6 heures du matin, étant à 120 miles environ de Belle-Isle, la tempête survint, enleva les compas, démolit les embarcations1, et renversa sur le pont le capitaine, qui, du coup, eut un genou déboîté et trois côtes enfoncées. Le capitaine, ne pouvant plus continuer son service passa le commandement au capitaine en second en lui disant d'aller relâcher à Belle-Île pour y prendre un pilote qui ramènerait le navire à Saint-Nazaire afin d'être réparé.
Le 30, vers 4 heures du matin, à deux milles au large de Lesconil, et dans le sud-est du Guilvinec, le Saint-Jean donna sur une roche, la machine ayant été brisée, l'eau s'y engouffra aussitôt. En voyant l'imminence du péril, tout l'équipage se réunit sur le pont. Comme il n'y avait plus une seule embarcation à mettre à la mer1, 12 des naufragés montèrent dans les haubans. Les autres qui étaient restés sur le pont2, furent bientôt balayés par les lames et engloutis.
Peu après, le mât de charge tomba sur le marin Jacques Nicol qui était amarré dans les haubans et le tua raide.

A 10 heures ½ du matin, le bateau de pêche Joseph et Marie, n° 725, patron Morzadec, de Léchiagat, abordait au Guilvinec ramenant 2 hommes de l'équipage naufragé. Un quart d'heure après, arrivait le bateau de sauvetage avec 9 autres naufragés et le cadavre de Nicol.

Au dire des marins, le naufrage a été uniquement par la tempête. IL était temps pour les malheureux survivants d'être secourus, car, épuisés de fatigue et de froid, et de plus secoués par la mer, toujours si mauvaise en ces parages, ils n'auraient pas tardé à rejoindre leurs compagnons au fond de l'abîme.

Cette opération périlleuse a fait le plus grand honneur aux courageux marins du bateau sauveteur, qui, une fois de plus, ont fait preuve de l'abnégation la plus absolue, n'hésitant pas à voler au secours de leurs semblables.

Le bateau de Lesconil, qui a dû pendant 3 heures lutter contre la mer, le courant et le vent, est arrivé en retard, mais n'en mérite pas moins une part dans les éloges.

Le navire est assuré pour perte totale ainsi que les marchandises
Le Saint-Jean était totalement coupé en deux et une partie de sa cargaison flottait, poussée par le vent dans la direction de la pointe de Beg-Meil, notamment les effets de l'équipage et des fûts de tabacs.

Les six disparus sont les suivants :
Guillou , François-Marie, 36 ans, capitaine commandant le Saint-Jean, originaire de Paimpol ; Chap, Edouard, 27 ans , capitaine en second, domicilié à Paris ; Levant, Jean-Marie, 40 ans, lieutenant, né à Saint-Mâlo ; Denon, Jules, 36 ans, chef mécanicien, né au Havre ; Guillemaud, Jean, 33 ans , chauffeur, né a Saint-Brieuc ; Kéroullé, Paul, 16 ans, mousse, né à Morlaix.

Voici les noms des survivants :
Friant, François, 30 ans, mécanicien en second ; Le Diaz, 32 ans, Mécanicien ; Clech, René, 42 ans , chauffeur ; Rivoal, François, 26 ans, cuisinier ; Le Courtois, Alexis, 30 ans ; Le Moullec, François, 28 ans ; Le Bras, Jean-Mathurin ; Kéroullé, Louis, 19 ans ; Squérin, François, 18 ans, matelots ; Marzin, François, 17 ans, novice et Mat, A lain, 10 ans, mousse.

Nicol, le matelot tué par la chute du mat de charge, était âgé de 35 ans et domicilié à Henvic, où habite sa femme.

Les survivants de ce terrible naufrage ont été soignés et habillés dans l'auberge de Mme veuve Stéphan, par les soins du Syndic des Gens de Mer. Trois d'entre eux étaient malades. M. le maire de Guilvinec a fait mander le Docteur Guével, de Pont-l'Abbé, qui, après examen, a déclaré qu'ils n'avaient que des contusions sans gravité.


Note KBCP :
(1) Lors de la déposition de l’équipage faite le 2 Janvier 1900 au juge de paix de Pont L’Abbé au sujet du sinistre, on sût qu'une des embarcations de sauvetage du Saint-Jean n'avait pas été détruite par le coup de mer. 

(2) Lors de cette même déposition, on apprit que quatre des six disparus n'ont pas été emportés par une vague mais qu'ils auraient embarqué dans ce canot de sauvetage.

Extrait de la Déposition de l'équipage du Saint-Jean faite au Juge de Paix de Pont-l'Abbé le 2 janvier 1900 : (Source Jean Roullot). 

—/— Le Bras dit qu'au moment où le navire a coulé, il se souvint  embarquer à bord de la baleinière, qu'ils étaient cinq, le capitaine blessé, le chef mécanicien, lui et deux autres qu'il n'a pas reconnu ; la baleinière a été enlevée, et lui a reculé dans la mature. —/— 

C'est donc quatre naufragés qui prirent place dans la baleinière.

L'article du «Courrier du Finistère» est identique à celui du journal «Le Finistère» retranscrit ci-dessus. Seul, en préambule à cet article, sont ajoutées ces quelques précisions :

Journal «Le courrier du Finistère» du 6 janvier 1900 

Le vapeur Saint-Jean, immatriculé au Havre et appartenant à la Société Navale de l'Ouest, était parti d'Anvers, le 25 décembre dernier, vers 7 heures du soir, chargé de diverses marchandises, telles que minerais, tabacs, sucre, café, etc1., à destination de Lisbonne.

 —/—

Note KBCP :
(1) Le lundi 5 juillet 2022, au Guilvinec, une plongée organisée par l'ASEB (Activités Subaquatique En Bretagne de Quimper), en collaboration avec le André Malraux, navire français de la DRASSM (Département des recherches subaquatiques et sous-marines) a permis de constater la présence de ciment et de charbon, mais point de minerais...


Journal La dépêche de Brest du 5 janvier 1900


Un naufragé du « Saint-Jean ». — La journée1 s'est terminée avec moins de gaieté. Le soir, il s'agissait de l'enlèvement du corps d'un sieur Jacques Nicol, naufragé du vapeur Saint-Jean, venu s'échouer en face de Guilvinec.

Le maire, les vétérans et les notabilités de la commune, accompagnés de la plus grande partie de la population, ont tenu à honneur de suivre le cortège funèbre jusqu'à l'église. La famille du malheureux marin, originaire de Henvic, était présente. Le cercueil, scellé par les soins de M. le maire, a été ensuite remis à la famille.

Une belle couronne a été offerte au malheureux Nicol par les soins de l'administration maritime.


Note KBCP :
(1) Journée des vétérans du Guilvinec du 1er Janvier 1900


Annales du Sauvetage Maritime du 1er trimestre 1900


LESCONIL (Finistère). 31 Décembre 1899. 

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

Hier matin, 30 courant à huit heures, le sémaphore de Lesconil aperçut à 3 milles et demie environ dans le Sud-Ouest, près de la roche appelée « La Fourche » un vapeur coulé dont un seul mât émergeait au-dessus de l'eau et dans lequel étaient cramponnés plusieurs hommes que l'on distinguait très bien à la longue-vue.


Sémaphore de Lesconil © Combier


Aussitôt le canon d'alarme fut tiré et, en moins d'un quart d'heure, le canot de sauvetage prenait la mer sous la direction du patron et du sous-patron pour le diriger sur le lieu du sinistre.

Comme il avait contre lui, la marée et plein vent debout, il n'avançait que très lentement et n'aurait pu sûrement arriver sur les lieux avant deux heures ou deux heures et demie de nage.

Voyant cela, et les malheureux qui étaient cramponnés dans le mât, risquant d'être enlevés à chaque grosse lame qui passait, le guetteur du sémaphore télégraphia à la station de Kérily-Penmarc'h dont le canot avait pour venir plein vent arrière et qui arriva sur les lieux du sinistre en quelques instants. Il fut assez heureux pour pouvoir sauver les hommes qui restaient à bord.

Comme je vous l'ai télégraphié hier, le canot de Lesconil était en arrière quoique sorti près d'une heure plus tôt, malgré le mal que se sont donnés les canotiers, qui étaient exténués, ayant ramé deux heures durant par mer grosse et vent debout.

Le bateau est rentré au port à midi vingt minutes et a été mis à l'abri au port de refuge, en attendant que la mer, qui est très grosse, permette de le mettre dans la maison-abri.


Lesconil - Abri du canot de sauvetage © Rivière-Bureau

D'après les renseignements que j'ai obtenus, le vapeur perdu s'appelle le « Saint-Jean », du Havre — capitaine GUILLOU, 18 hommes d'équipage — il venait d'Anvers et se rendait à Lisbonne chargé de diverses marchandises ; il y aurait 6 hommes de perdus et 1 de tué dans les haubans ce qui ferait onze hommes de sauvés.

Veuillez, etc.

Le Secrétaire du Comité local, RICHARD.

Armement du canot « Joubert de Bizy » : TRÉBERNE (Jacques), patron ; MARÉCHAL (Armand), sous-palron ; CARIOU (Germain) , GOULARD (Théodore) , CHARLOT (Jean) , CARIOU (Jean), CHARLOT(Nicolas), ROY (Yves), STEPHAN (Nicolas), SYNOUX (Corentin), COCI (Auguste), VOLANT (Henri).


————— o —————


KÉRITY PENMARC'H (Finistère). 

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

A neuf heures moins dix, j'étais prévenu par M. SALOU, chef guetteur du sémaphore de Penmarc'h, qu'un vapeur était coulé entre Guilvinec et Kérity.

Sémaphore de St Pierre-Penmarc'h en 1899

J'ai l'honneur de vous rendre compte que le canot de sauvetage « Comte et Comtesse Foucher de Saint-Faron » a effectué une sortie le 30 décembre à neuf heures du matin, pour se porter au secours d'un navire à vapeur coulé sur un plateau de roches situé à environ deux milles sud du Guilvinec.

Le patron JÉGOU (Joseph) fils est parti dans la direction donnée avec les renseignements fournis par M. SALOU

Le canot de sauvetage a été mis vivement à l'eau, a quitté le port de Kérity et est arrivé sur le lieu du sinistre à neuf heures vingt. Quelques hommes de l'équipage du vapeur étaient cramponnés dans mâture, exténués de fatigue et demandant du secours ; quatre de ces pauvres marins étaient à moitié nus. Ils furent recueillis les premiers, et on leur donna les premiers soins ; les cinq autres furent recueillis quelques minutes après.


Trajet effectué par le canot de sauvetage de Kérity © Service Hydrographique de la Marine (1904)

Pour nous assurer que nous avions bien recueilli tous les naufragés, le canot de sauvetage fit le tour du vapeur, écoutant de tous côtés si un cri, une plainte se faisait encore entendre.


En continuant notre inspection, le patron JÉGOU aperçoit un corps, on approche et on embarque un marin déjà froid, presque mort; on lui donne quelques soins. Rien n'y faisait, voyant cela le patron JÉGOU dit : « Rien à faire ici maintenant : Route sur le Guilvinec, port le plus rapproché du vapeur coulé, là nous déposerons les pauvres naufragés sous la responsabilité de la Marine, où ils recevront de meilleurs soins que ceux que nous pouvons leur donner ici, ils auront du feu et prendront quelque chose de chaud. »

Quelques instants après, le canot de sauvetage entrait dans le port de Guilvinec avec les dix naufragés recueillis dont neuf naufragés vivants, le dixième étant mort dans le trajet du vapeur au port de Guilvinec.

Le patron JÉGOU et quelques canotiers ont porté plutôt que conduit les pauvres malheureux naufragés au Syndicat de la Marine où des soins leur onl été donnés.

Le sauvetage a été très difficile, à chaque instant l'équipage et les malheureux naufragés étaient couverts par la mer qui était très grosse ; le vent soufflait en tempête.

Le patron et les canotiers du canot de sauvetage n'ont pu obtenir aucun renseignement des naufragés, ils étaient trop faibles pour répondre aux questions qu'on leur posait.

Le capitaine, le second, le maître mécanicien et trois hommes de l'équipage ont disparu avant notre arrivée à bord du vapeur. Nous n'avons trouvé aucune trace ni renseignements sur ces infortunés marins.

Le canot de sauvetage s'est très bien comporté.

Le canot est rentré à Kérity à trois heures quarante cinq du soir, où il a été remonté et mis dans son abri.


Kérity - Abri du canot de sauvetage © Rivière-Bureau

Le sang-froid du jeune patron JÉGOU (Joseph) a été remarquable dans ce beau sauvetage.

Veuillez agréer, etc.

Le Président du Comité local, COLLIN.

Armement du canot de sauvetage « Comte et Comtesse Foucher » : JÉGOU (Joseph) fils, patron ; LOUSSOUARN, (Jean) brigadier, PORS (Paul), STÉPHAN (Noël), BRIEC (Sébastien), FONTAINE (Paul), GOURLAOUEN (François), KERLOCH (Allain), GOULIQUER, (Vincent), COÏC (Corentin), LE PAPE (Eugène), CANEVET (René), STÉPHAN (Joseph), canotiers. 



 À la suite de la perte du vapeur « Saint-Jean » à Penmarc'h, il sera demandé au Préfet Maritime de Brest de vouloir bien prescrire aux chefs guetteurs des sémaphores de prévenir, en cas de sinistre, toutes les stations de sauvetage à même de porter secours et non plus seulement la plus rapprochée de leur poste.



(Lettre du directeur de la Société Navale de l'Ouest au président de la SCSN)


Paris le 11 janvier 1899. 

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

Le 30 décembre dernier, notre vapeur « Saint-Jean.» coulait à la pointe de Lesconil et neuf hommes de son équipage étaient sauvés grâce aux courageux efforts et au dévouement du patron et des marins du canot de sauvetage de Kérity (Finistère), « Comte et Comtesse Foucher de Saint-Faron ».

Deux autres de nos matelots étaient recueillis par un bateau de pêche dont nous ignorons le nom.

Désirant témoigner sa reconnaissance à ces braves gens, notre Conseil d'Administration vient de voter pour eux une somme de deux cent cinquante francs, que nous nous permettons de vous remettre sous ce pli, avec prière de bien vouloir leur en faire la répartition, n'ayant pas les moyens.de nous acquitter de.ce soin.

Avec nos, remerciements, nous vous prions d'agréer, Monsieur, le Président, l'assurance de nos meilleurs sentiments.

Le Directeur de la Société, Léon BOSQUET.


DONATIONS À LA SCSN

--/--

Par la Société Navale de l'Ouest, en reconnaissance du Sauvetage de l'équipage du Vapeur « Saint-Jean », par le canot de la Station de Kérity-Penmarc'h :

Souscription annuelle " de 100 Fr. et pour la station de Kérity 250 Fr.


RÉCOMPENSES


Sauvetage de l'équipage du vapeur « Saint-Jean », naufragé près de Guilvinec, 30 décembre 1899.


Témoignages officiels de satisfaction.

JÉGOU (Joseph-Marie), patron du canot de sauvetage de Kérity-Penmarc'h ; PORS (Paul-Bernard), COÏC (Corentin), STÉPHAN (Noël-Marie), LOUSSOUARN (Jean-Marie), CANÉVET (René-François), KERLOCH (Alain-Marie), FONTAINE (Léopold-Aimé), BRIEC (Sébastien-François), GOURLAOUEN (François-Marie), GOULIQUER (Vincent-François), LE PAPE (Jean-Eugène), matelots dudit canot.


MÉDAILLES ET DIPLOMES

KÉRITY-PENMARC'H (Finistère).


Sauvetage des 10 hommes du vapeur « Saint-Jean », 30 décembre 1899.

Médaille d'argent de 1re classe. JÉGOU (Joseph) fils, patron du canot de sauvetage.

Médailles d'argent de 2e classe.

LOUSSOUARN(Jean), sous-patron ; BRIEC (Sébastien), GOURLAOUEN (François) et GOULIQUER (Vincent), canotiers.

Médailles de bronze.

STÉPHAN (Noël), LE PAPE (Eugène), CANEVET (René), canotiers.

Diplômes d'honneur.

PORS (Paul), FONTAINE (Paul), KERLOCH (Allain), COÏC (Corentin) et STÉPHAN (Joseph), canotiers.

Argent 1ère classe

Argent 2ème classe

Bronze

Diplôme d'Honneur


PRIX

Le prix du vice-amiral MÉQUET1 est attribué à la station de Kérity.

Kérity, sauvetage des 10 hommes du vapeur Saint-Jean, 30 décembre 1899.

Le 30 décembre 1899 au matin, la station de Kérity était avisée qu'un vapeur venait de couler sur un plateau de roches à deux milles au large de Guilvinec par un fort coup de vent du S.-E. mer très grosse. C'était le vapeur « Saint-Jean » du Havre.

Cinq minutes après le choc, le navire avait sombré entraînant avec lui six hommes dont le capitaine et le mousse. Mais on apercevait encore une dizaine d'hommes cramponnés dans les haubans du grand mât, grappe humaine se détachant en noir sur l'écume des vagues.

Le canot de sauvetage « Comte-et-Comtesse-Foucher-de-Saint-Faron » est lancé et il part. Porté par le vent, en vingt minutes il arrive auprès de l'épave.

Un des naufragés atteint par une poulie avait été tué sur le coup et retombait inerte le long des haubans, suspendu par les pieds. Les neuf autres, à moitié nus, ruisselant d'eau glacée, sont recueillis les uns après les autres, soignés et réchauffés autant que possible.

Amiral Eugène Louis Hugues
baron Méquet 

Le patron JÉGOU ne veut pas s'éloigner du « Saint-Jean » sans en avoir fait le tour. Il aperçoit en effet à demi submergé un corps soutenu par une planche. Il s'approche et l'embarque.

Impossible de songer à rentrer à Kérity contre le vent et une mer démontée ; d'ailleurs, les naufragés ont besoin de prompts secours. Le patron se dirige sur Guilvinec.

A l'arrivée du canot, toute la population est sur la grève, dans l'angoisse. Combien de morts ? Combien de vivants?

Les femmes chantent un cantique à sainte Anne, la patronne des marins bretons.

De sauvés, il n'y en a que neuf?

JÉGOU est un jeune, il n'en est encore qu'à sa deuxième sortie comme patron. II remplace son père qui, pendant de longues années, a tenu ce poste d'honneur.


Note KBCP :
(1) Le prix du vice-amiral Méquet est d'un montant de 755 fr.



Pour finir, une gratification de 100 Fr. a été offerte à l'équipage par Mme Jeanne-Pierre Julie Fort Comtesse Foucher de Saint-Faron.